formation VTC – statut
formation VTC – statut
conducteurs de VTC : un statut, enfin ?
La puissance des plates-formes numériques de réservation de voitures avec chauffeur – qui ont révolutionné le transport particulier de personnes et se sont développées à forte allure en s’adaptant aux cadres légaux des différents pays – contraste avec la situation des chauffeurs qui, atomisés, sans représentation syndicale organisée par la loi permettant le dialogue social, sont totalement dépendants d’elles. En effet, elles décident du prix des courses, monopolisent l’intermédiation entre les chauffeurs et les usagers, déterminent leur statut social en privilégiant aujourd’hui le modèle du travailleur indépendant – censément libre d’organiser son travail – plutôt que celui de salarié. Au prix d’une grande précarité : les chauffeurs doivent payer jusqu’à 25 % de commission chez Uber qui peut les « débrancher » à tout moment, les privant de leur gagne-pain sans véritable possibilité de se défendre.
L’article 20 du projet de loi LOM prévoit que les plates-formes peuvent établir une charte « déterminant les conditions et modalités d’exercice de (leur) responsabilité sociale », précisant notamment « les modalités visant à permettre aux chauffeurs d’obtenir un prix décent ». Nulle obligation ici : la situation sociale et économique de dizaines de milliers de chauffeurs dépend du seul bon vouloir de plates-formes dont la priorité est le profit de court terme et, à long terme, le développement des véhicules autonomes… sans chauffeur !
Cette disposition nous semble donc bien en deçà des besoins des chauffeurs et des intérêts des consommateurs : les nouveaux métiers issus du numérique appellent de vraies protections et des perspectives ambitieuses, notamment un tarif minimum pour assurer une rémunération décente à des chauffeurs qui sont nombreux à travailler 60 heures par semaine pour un revenu net équivalent au SMIC.
Il existe un statut qui rend compatible l’indépendance dans l’organisation du travail avec les avantages légaux des salariés.
Lutter contre la précarité croissante des chauffeurs de plate-forme est possible. Il existe un statut hybride qui rend compatible l’indépendance dans l’organisation du travail avec les avantages légaux dont bénéficient les salariés. Créé par la loi de juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, le statut d’« entrepreneur salarié associé » (ESA) de coopérative d’activité et d’emploi (CAE) permet aux chauffeurs qui souhaitent se regrouper au sein d’une coopérative de soutenir leur modèle économique, de mutualiser les charges et de s’organiser face aux plates-formes, en particulier pour négocier le taux de commission, tout en étant partie prenante à la gouvernance de l’entreprise.
Le statut d’ESA permettrait aux plates-formes de clarifier leurs relations avec les chauffeurs et les mettrait à l’abri du risque de requalification de ces relations en salariat, que plusieurs décisions de justice récentes ont rendu avéré. L’Etat y trouverait aussi son compte, car il pourrait s’appuyer sur les CAE pour faire appliquer des règles plus précises en matière de conditions et de temps de travail, de formation professionnelle, voire de sécurité des consommateurs, et pour sécuriser le recouvrement des cotisations sociales.
Inventer la protection économique et sociale du XXIe siècle pour les chauffeurs de VTC est à portée de main : le cadre juridique existe déjà dans le Code du travail, il suffirait que le projet de loi mobilité l’impose aux plates-formes dans une charte de responsabilité sociale souscrite obligatoirement. Reste à savoir si la volonté politique de donner un statut social et économique aux chauffeurs de VTC est réelle ?